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Ainsi étaient les sahâbas : Abû ‘Ubaydah ibn al-Jarrah

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C’est un compagnon du Prophète ﷺ trop méconnu : Abû ‘Ubaydah ibn al-Jarrah (RadiAllâh ‘anhu)… Et pourtant ! L’un des dix qui reçut la bonne nouvelle du Paradis de son vivant, le 9ème converti à l’islâm, Abû ‘Ubaydah est un modèle de noblesse, de dévotion et de sincérité, à tel point que le Messager d’Allâh ﷺ le nomma “le gardien de la Ummah”, l’homme de confiance de la Nation islamique.

Cinq anecdotes montrent l’homme qu’il était, et son amour pour l’islam, Allâh et Son Prophète ﷺ : la première, à la bataille de Badr, où il retrouve son père, resté fidèle au culte polythéiste de ses ancêtres, dans les rangs de Quraysh. Par respect filial, il cherche à l’éviter pendant la mêlée. Mais au cours de la bataille, son père, l’un des plus farouches ennemis de l’islam, parvient à lui bloquer la route et l’attaque : Abû ‘Ubaydah n’a d’autre choix que de le combattre et le tuer.

C’est à son sujet qu’Allâh révélera :

“Tu n’en trouveras pas, parmi les gens qui croient en Allâh et au Jour dernier, qui prennent pour amis ceux qui s’opposent à Allâh et à Son Messager, fussent-ils leurs pères, leurs fils, leurs frères ou les gens de leur tribu. Il a prescrit la foi dans leurs cœurs et Il les a aidés de Son secours. Il les fera entrer dans des Jardins sous lesquels coulent les ruisseaux, où ils demeureront éternellement. Allâh les agrée et ils L’agréent. Ceux-là sont le parti d’Allâh. Le parti d’Allâh est celui de ceux qui réussissent.” (58/22)

L’année suivante, à la bataille de Uhud, alors que les forces de Quraysh reprennent le dessus, Abû ‘Ubaydah est l’un de ceux qui restent fermes et compte parmi les derniers défenseurs de Muhammad ﷺ. Alors que le Prophète ﷺ tombe de cheval, des anneaux de son casque s’enfoncent profondément dans sa joue : c’est Abû ‘Ubaydah qui va les extraire avec sa bouche, perdant au passage deux de ses dents avant. Une blessure qui immortalisera son amour pour l’Envoyé d’Allâh ﷺ…

Des années plus tard, à la mort du Prophète ﷺ, le jour d’as-Saqifa, alors que ‘Umar ibn al-Khattab lui demande de tendre son bras afin de lui faire allégeance, il répond “Comment pourrais-je devancer un homme que le Prophète ﷺ a désigné pour diriger la prière en son absence?”, orientant ainsi le choix de l’assemblée vers Abû Bakr as-Siddiq et refusant de saisir le pouvoir qui lui tendait les bras alors qu’un homme meilleur que lui était présent.

Quatre ans plus tard, lors de la conquête du Shâm, alors que Khalid ibn al-Walid vole de victoire en victoire face aux Byzantins, ‘Umar ibn al-Khattab transfère le commandement à Abû ‘Ubaydah, de peur que les musulmans ne commencent à idolâtrer Khalid. Loin de s’enorgueillir de sa nouvelle position, Abû ‘Ubaydah garde Khalid comme conseiller privilégié : à la décisive bataille de Yarmouk, il décide même de lui transférer le commandement suprême, faisant ainsi passer l’intérêt des musulmans avant son ego. Une sage décision, puisque le génie militaire de Khalid va permettre d’emporter la décision et d’assurer au califat la mainmise sur le Shâm pour les siècles à venir. Ils prendront ensuite, ensemble, al-Quds, Damas, Alep, avant de pénétrer en Anatolie et en Arménie. Par son exemple, Abû ‘Ubaydah va également amener la conversion de nombreuses tribus chrétiennes de la région.

Enfin, alors que le calife ‘Umar le rappelle à Médine pour qu’il échappe à la Grande Peste qui frappe son armée, Abû ‘Ubaydah répond : “Je sais ce qui te pousse à agir ainsi. Mais je suis à la tête d’une armée de musulmans et je n’ai aucun désir d’échapper à ce qui les afflige. Je ne souhaite pas me séparer d’eux jusqu’à ce qu’Allâh en décide ainsi. Ainsi, quand cette lettre t’atteindra, relève-moi de mon commandement et permets-moi de rester avec mes hommes.” ‘Umar fondit en larmes à la lecture de ces mots, et Abû ‘Ubaydah s’en retourna à son Créateur dans les semaines suivantes, en l’an 18 de l’Hégire, dans la vallée du Jourdain.

Ainsi étaient les sahâbas.

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