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ÉDITO. Chers musulmans, la République ne vous aime pas

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Le 10 novembre 2019, des dizaines de milliers de musulmans ont marché dans Paris contre l’islamophobie, et ce malgré une campagne médiatique hostile à cette mobilisation, alimentée par des élus, des journalistes et même par des ministres du gouvernement d’Emmanuel Macron, ce “moindre mal”. Elle a été ainsi qualifiée de “lamentable” par Jean-Michel Blanquer et d'”insupportable” par Gabriel Attal. On pensait qu’après avoir scandé des slogans déclarant leur flamme à la laïcité “Laïcité on t’aime, tu dois nous protéger”, entonné la marseillaise place de la Nation ou encore arborer des slogans type “Non à la haine du croyant, oui à la critique des religions”, les marcheurs allaient bénéficier des éloges des patriarches de la République. Il n’en était rien. Le soir même, des “experts” défilaient sur les plateaux accusant ses initiateurs d’être les promoteurs de l’islam politique, ce fantasme bien français. Nous sommes bien loin de l’unanimité républicaine accompagnant les rassemblements du très communautariste Conseil Représentatif des Institutions Juives de France. Ce dernier a d’ailleurs tenu sa convention annuelle en présence de ministres dont Jean-Michel Blanquer, assis côte à côte avec Yves Thréard, l’éditorialiste du Figaro qui a récemment déclaré ceci “Il m’est arrivé, en France, de prendre le bus ou un bateau où il y avait quelqu’un avec un voile, et je suis descendu”.

Une ultime humiliation donc pour les musulmans de France et sans doute pas la dernière car beaucoup continuent de croire encore que la République aime “tous ses enfants”. Au fond la République ne nous aimera pas tant que nous n’avons pas suivi le chemin pris par Zineb El Rhazoui, Mahomet Sifaoui, Malik Boutih, Sonia El Mabrouk et j’en passe. Plus grave encore, cracher sur les musulmans peut vous valoir les honneurs de la République, de la Légion d’Honneur de Michel Houellebecq au prix Simone Veil discerné à Zineb El Rhazoui par la région Ile-de-France deux jours à peine après que cette haineuse ait appelé à tirer à balles réelles sur les jeunes de banlieue.

En vérité la France a atteint un point de non-retour depuis l’attaque au couteau de la préfecture de Paris, qui n’était finalement pas à caractère terroriste comme on a tenté de nous le faire croire. Il y a eu le discours de Macron contre l'”hydre islamiste” appelant à une “société de vigilance” (délation), puis l’inventaire des signaux faibles de radicalisation de Castaner, puis le formulaire de l’université de Cergy pour repérer les étudiants potentiellement radicalisés, puis l’humiliation d’une femme voilée qui accompagnait son fils pour découvrir le fonctionnement d’une institution républicaine accusée par la suite par le président d’être liée à l’islam politique, puis l’attentat de Bayonne contre une mosquée non considérée comme une attaque terroriste et enfin le chef de l’État qui donne une interview à un magazine de l’ultra droite, qui compare l’islam au nazisme et les musulmans à des envahisseurs.

Débat après débat. Non contents d’avoir tour à tour interdit le voile sur les pièces d’identité, le voile à l’école, le voile intégral, les prières de rue, et Dieu sait ce qu’ils préparent encore pour parer l’ignominie de la légalité légitime, ils ont lancé des polémiques sur le voile à l’université, le voile dans la rue, le voile au travail, le voile à côté de l’école, le voile au sport, le voile sur la plage, le voile à la piscine, les bandanas qui imitent les voiles, les jupes longues, les barbes non taillées, l’absence de barbe comme pratique de la dissimulation (taqiyya), la tâche sur le front, les mosquées radicalisées, les hommes qui ne serrent plus la main aux femmes ou qui refusent la bise, les imams du bled, les imams de France, l’islamofascime, l’islamonazisme, l’argent du Qatar, les “listes communautaristes” et tant d’autres qu’on n’arrive même plus à suivre.

Sache qu’il faut vous faire une raison : ici on ne vous aime pas et vous serez les éternels étrangers que la République aura digéré dès lors que vous aurez consenti à délaisser votre folklore culturel d’outre-Méditerranée, à vous intégrer donc. Vous êtes les anciens «bougnoules», devenus «français d’origine immigrée» pour enfin avoir le droit d’être des «français de la diversité». Divers. Vous êtes dans la case «divers», comme la dernière des cases en bas d’un questionnaire, celle qui regroupe tous les inclassables. D’ailleurs, même le français «de souche» quand il se convertit devient partie prenante de ce corps étranger.

Ce n’est pas pour autant que nous devons baisser les bras et laisser agir ceux qui rêvent de faire de nous de futurs ouïghours. Si l’islamophobie (si l’on entend par ce mot la détestation de l’islam) est un fait divinement normal, combattre les idéologues de la haine qui incitent à des lois liberticides contre nous est tout aussi normal.

Crédit photo : @abdelM9

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