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27 juillet 1909 : la bataille du Ravin-du-Loup marquait le début de la résistance rifaine

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Bataille du Ravin-du-Loup

Il y a 110 ans, une poignée de résistants rifains mettaient en déroute l’Espagne coloniale lors de la Bataille du Ravin-du-Loup à une dizaine de kilomètres de Melilla au nord du Maroc. Cette bataille fut conduite par Mohammed Ameziane (né en 1859) considéré comme le précurseur de la Résistance rifaine.

Une figure moins connue que celle d’Abdelkrim. Pourtant, l’homme mena une centaine de batailles en seulement trois ans avant de tomber martyr.

À cette époque, les tribus qui entouraient la ville de Melilla vivaient sous le joug de Jilali ben Driss Zirhouni Al-Youssefi, dit Rogui Bou Hmara, un charlatan qui se faisait passer pour le frère du sultan Abd El Aziz. Celui-ci va négocier avec l’Espagne l’exploitation des gisements miniers pour le compte des compagnies espagnoles et françaises. L’initiative suscita une vive opposition des tribus du Rif. Dans les réunions entre chefs de tribus, il est décidé de mener une campagne de sensibilisation sur les dangers coloniaux dans les mosquées et les souks. Les Rifains vont alors se rebeller et attaquer les exploitations minières le 8 août 1908, cela sera la fin pour Bou Hmara, qui sera chassé du Rif Oriental et son armée battue. Il sera pas la suite capturé et exécuté.

Le vendredi 9 juillet 1909, l’appel au jihad est proclamé. Immédiatement, une série d’attaques contre les intérêts industriels espagnols dans la région sont lancées parmi lesquels, un chantier de construction de pont pour une ligne de chemin fer à Sidi Musa (près de Beni Ensar). L’attaque fera 6 morts parmi les militaires espagnols. Lorsque Madrid eut connaissance de ces évènements, le gouvernement d’Antonia Maura qui dirigeait le pays décida le 10 juillet 1909 de mobiliser 3 brigades mixtes de chasseurs formées principalement par des réservistes. Au total entre 30 et 40 000 militaires commandés par le général Marina sont envoyés pour assurer la protection de la ville de Melilla sous occupation espagnole depuis 1497 face à un éventuel assaut des rifains.

S’en suit une multitude d’autres attaques les 18, 20 et 22 juillet. Après cette dernière opération, le général Marina décida d’organiser le 26 juillet un nouveau convoi de troupe, car ses renseignements l’informèrent que les hommes d’Ameziane préparaient une attaque contre une position espagnole qui se trouve située au pied de la montagne Gourougou. Mais ce convoi sera immédiatement attaqué près du Ravin-du-Loup par les Rifains le 27 juillet. Les troupes espagnoles vont paniquer et vont battre en retraite dans la confusion. Au terme de ces batailles acharnées, les Espagnols seront lourdement touchés, plus de 1 000 morts et 600 blessés. Parmi les morts le général Guillermo Pinots. Le 29 septembre de la même année, les troupes espagnols sont à nouveau défaites à Souk el-Khemis, le bilan est lourd : 300 morts dont le général Vicario.

Bataille du Ravin du Loup

En Espagne, la défaite du Ravin-du-Loup est considérée comme un «désastre» (Desastre del Barranco del Lobo), au même titre que celle d’Anoual qui aura lieu 12 ans plus tard sous le commandement d’Abdelkrim.

MOHAMED AMEZIANE, LE HÉRO OUBLIÉ

Né en 1859 à Segangan, Mohamed Ameziane fréquente l’école coranique, et étudie le Coran et le fiqh (la jurisprudence islamique) sous la conduite du cheikh Abou Hassan Saidali Tanouti. A 27 ans, il part à Fès poursuivre ses études de théologie et de littérature. A 31 ans, il regagne sa région natale et y devient à la fois un chef religieux et un juge (cadi). A ce titre, il appelle les tribus du Rif à combattre le colonialisme espagnol.

Après ces multiples défaites, les Espagnols changent de stratégie : ils ciblent les tribus les plus faibles de la région, les achètent à coup de privilèges commerciaux, intensifient les recrutements de collaborateurs locaux afin de bénéficier de leur bonne connaissance de la topographie locale et de les utiliser en tant que boucliers humains en première ligne. Surtout, ils infiltrent les mujâhidîn avec des agents provocateurs qui, tout en espionnant, créent des dissensions internes : s’accusant mutuellement de trahison, les différentes tribus commencent à se séparer, et la fragile coalition d’Ameziane se rompt. Ce dernier se retire alors dans sa tribu et établit un nouveau bastion à Souk al-Jumu’a, à Amaworo, d’où il poursuit la lutte et continue à refuser toutes les offres espagnoles : énormes sommes d’argent ou encore poste de gouverneur du Rif et de négociateur avec le sultan du Maroc.

Troupes espagnoles à Oued Kert

Il parvient à infliger d’importantes pertes humaines et matérielles aux Espagnols à la bataille de l’oued Kert, et à tuer le général Ardonit à la bataille d’Imarofen en septembre 1911. Raids et contre raids se poursuivent jusqu’au 14 mai 1912 : des espions observent alors qu’Ameziane et 700 de ses hommes se dirigent chez les Banû Sidal, et suivent leurs pas jusqu’à ce qu’ils s’arrêtent dans la mosquée de Tawrirt Kdiya. Les Espagnols, alertés, se précipitent pour l’assiéger. Quand il apprend qu’il est cerné, Muhammad Ameziane dirige salât al fajr puis donne le choix à ses compagnons : combattre jusqu’au martyr, ou se retirer via un passage montagneux. Lui-même engage en premier le feu sur l’ennemi : après plusieurs heures de combats acharnés, il tombe finalement martyr dans l’après-midi, touché par une balle espagnole, à l’âge de 53 ans.

Les Espagnols transportent son corps à Melilla, puis il est remis à ses frères qui l’enterrent au cimetière de leur grand-père, Cherif Ahmed ibn ‘Abd as-Salâm, à Segangan. Sa tombe sera gardée pendant plus d’un an par les troupes coloniales pour empêcher ses partisans de s’y recueillir. Quelques mois plus tard, en novembre 1912, la convention franco-espagnole de Madrid officialisait le protectorat espagnol sur le Rif, conséquence de la soumission du sultanat du Maroc à la France par le traité de Fès signé plus tôt. Ce n’est que neuf ans plus tard, en 1921, que la résistance rifaine renaîtra, menée par le célèbre Mohammed Ben Abdelkrim al-Khattabi…

Source : Ribât (pour la deuxième partie de l’article)

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