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L’indépendance, cette notion si abstraite

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La Catalogne devenue indépendante, voilà les grandes puissances démocratiques y allant toutes de leurs douces condamnations. La chose serait illégale, même illégitime. Ce serait aussi une autre façon de faire sécession d’avec une Europe que l’on chercherait à péniblement garder unie. Dire oui à la Catalogne, ce serait encore dire oui à d’autres. Inacceptable pour bien de cols blancs de Bruxelles à Strasbourg. Ce sera donc non, en majuscule et surligné. Mais démocratiquement parlant, on en dit quoi ?

Démocratiquement, si l’on reprend les chartes et déclarations diverses écrites par les mêmes grandes puissances qui là s’insurgent, les catalans seraient dans leur droit. En effet, les peuples, et c’est écrit notamment noir sur blanc en l’article premier de la charte de l’ONU, ont le droit de pouvoir disposer d’eux-mêmes ceci en invoquant la propriété de leur destin. N’est-ce pas là ce que viennent de faire les catalans ? On pourrait certes avancer que le faisant en un Etat déjà constitué, contre une autorité instituée, la démarche manquerait à se montrer sage. Ce n’est pas tout à fait faux, mais pour autant, ne va-t-il pas de soit qu’un peuple souhaitant faire valoir ses droits le fasse inéluctablement contre une autorité donnée manquant peut-être à lui les donner … ? Puis, si les catalans manquent ici de légitimité, que dire alors de ceux les ayant en ce sens précédé montrant jadis en des temps plus révolutionnaires la marche à suivre à tout un monde.

Aussi, pourquoi dit-on non à la Catalogne quand il est dit oui à d’autres ? On se rappelle en exemple que l’ONU avait ainsi lui-même organisé le referendum visant à donner l’indépendance au Timor Oriental alors encore indonésien. Aussi se souvient-on de ce blanc-seing donné par les grandes puissances démocratiques aux chrétiens du sud Soudan souhaitant s’émanciper du nord Soudan musulman. Il y a 7 ans de cela, la Cour de Justice Internationale donna encore raison aux indépendantistes kosovars arguant de fait qu’ils ne violaient aucune loi internationale… La France avait même reconnu l’Etat nouveau dès le lendemain. Cet été encore, la communauté internationale semble avoir aussi été très réjouie d’accompagner les kurdes dans leur indépendance en un pays, l’Irak, pourtant pourvu d’une intégrité territoriale et d’une constitution donnée.

Re-démocratiquement parlant, les catalans se sont en plus de cela montré des plus pédagogues. Si d’autres usèrent de violence pour faire valoir leurs droits, là l’ensemble des outils démocratiques semblent avoir été pacifiquement usés. Ayant longtemps dialogué avec Madrid, manifesté des années durant sans violence, voté à la majorité absolue pour des partis indépendantistes, et tout récemment encore voté en un referendum à 90 % pour leur indépendance ; on ne peut le leur retirer : les catalans sont de véritables praticiens démocrates. Mais comment exercer son droit démocratique, que de disposer de soi-même, en une démocratie déjà établie refusant qui plus est d’en partager la couette ?

Ironique situation que de voir tous ces États s’étant tout justement construits dans l’opposition, usant de sanglantes et démocratiques sentences, maintenant refuser que de plus petits empruntent la même voie. L’arroseur arrosé ou quand la démocratie vient tout bêtement, une fois de plus, de se retourner contre elle-même.

Sarrazins

"Sarrazins" est un webzine indépendant, crée en 2016, qui a pour vocation d’apporter un regard musulman sur l’actualité

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