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Histoire

21 mai 1864 : génocide des musulmans circassiens par la Russie des Tsars

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Il y a 153 ans, le 21 mai 1864, débutait le génocide oublié des musulmans circassiens par la Russie des Tsars. Ce crime de grande ampleur est parfois considéré comme “le précurseur de la stratégie du nettoyage ethnique et du génocide moderne” : en quelques mois, des centaines de milliers de Circassiens vont être tués, plus d’un million forcés à fuir vers l’Empire ottoman et parfois la Perse; seuls 10% environ pourront rester sur leurs terres.

Tout commence au cours du 19ème siècle lorsque la Russie impérialiste s’étend vers le Sud, où elle rencontre une farouche résistance des peuples musulmans du Caucase : à l’Est, le fameux imam Shamil se rend en 1859, avec la Tchétchénie et le Daghestan, tandis que la Circassie, à l’Ouest, va elle résister jusqu’en 1864. Dès 1857, le Ministre de la guerre russe émet l’idée de “l’élimination complète des Circassiens” par leur expulsion massive & leur remplacement par des colons chrétiens : le projet est validé par l’état-major de l’armée du Caucase, puis finalement par le tsar Alexandre II en mai 1862.

Les troupes russes commencent par préparer le terrain en employant des méthodes de plus en plus sanguinaires pour briser la résistance circassienne et rendre tout retour en arrière impossible : incendies de centaines de villages entiers, assassinats quotidiens, enlèvements et exécutions de familles entières, n’épargnant ni femmes ni enfants, destruction systématique du bétail et des cultures, famine méthodiquement planifiée. Ils mettent également en place un réseau de routes et installent de nouvelles communautés de paysans russes et cosaques. Les autorités religieuses et tribales musulmanes, cherchant un refuge à ces persécutions et craignant la conversion forcée au christianisme et/ou la conscription dans l’armée impériale, se tournent vers l’Empire ottoman, qui décide de les accepter “à bras ouverts”.

Dans la foulée, l’armée russe encercle les villages, réunit les habitants et les dirige vers les ports de la Mer Noire, dont la célèbre Sotchi, où les attendent des navires ottomans. En deux mois seulement, le peuple Ubykh entier est expulsé; les déportations touchent aussi les musulmans d’Abkhazie, de Tchétchénie ou d’Ingoushie, dont 80% doivent quitter leurs terres. L’état-major de l’armée du Caucase exulte : “En cette année 1864, un acte a été accompli sans presque aucun précédent dans l’Histoire : pas un seul des habitants de la montagne ne reste dans son lieu de résidence, et des mesures sont prises pour nettoyer entièrement la région afin de la préparer pour la nouvelle population russe.”

Les conditions de la déportation sont dramatiques : épidémies qui se déclenchent dès les ports de départ, naufrages de navires trop remplis (jusqu’à 1800 personnes, des observateurs parlent de “cercueils flottants”) durant des tempêtes, déshydratation, famine, tuent des dizaines de milliers de réfugiés, sans parler des difficultés vécues lors de la réinstallation des musulmans circassiens en Anatolie, dans les Balkans ou au Sham. Malgré tout, certains connaîtront de belles carrières au sein de l’Empire ottoman, notamment dans l’armée; d’autres refonderont la ville d’Amman, capitale actuelle de la Jordanie, qui, au début du siècle dernier, ne comptait que des habitants circassiens. Leurs descendants sont aujourd’hui plusieurs millions dans la Turquie moderne, connus sous le nom de Çerkes.

Ils seront rejoints quelques décennies plus tard par les musulmans de Géorgie et les Lazes (1878) puis les minorités turco-musulmanes des Balkans (1912-13) et de Grèce (1922-23), dans ce qui apparaît aujourd’hui comme une volonté délibérée d’éliminer toute présence islamique en Europe par le meurtre de masse et le nettoyage ethnique – sur le modèle du précédent andalou quelques siècles plus tôt.

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