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A Eauze, la mosquée et les domiciles de cinq de ses responsables perquisitionnés

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Les responsables de l’association des musulmans d’Eauze vivent très mal les perquisitions de leur lieu de prière et de leurs domiciles. Ils peuvent compter sur le soutien des amis du groupe de parole qui réunit des Elusates de toutes confessions.

Mosquée d'Eauze

La salle de prière musulmane d’Eauze, petit village de moins de 4000 habitants

«Si mes enfants n’étaient pas scolarisés, je crois que je serais parti.» Ces mots de M. (*) traduisent le profond désarroi dans lequel se trouvent les responsables de l’association des musulmans d’Eauze depuis le soir du 18 novembre, quand des dizaines de gendarmes sont venus perquisitionner les domiciles de cinq d’entre eux et le lieu de prière situé rue Carbonas, une paisible artère du centre historique. Des perquisitions qui «n’ont rien donné», comme le reconnaissait lui-même le préfet vendredi dernier, à Auch, en réunissant les maires pour les informer des dispositions de l’état d’urgence. Mais dix jours après cette opération, d’autant plus visible dans une petite ville comme Eauze, les personnes concernées accusent encore le coup.

«On s’est sentis humiliés, stigmatisés. Je me mets à la place des voisins ou de ceux qui ont vu nos maisons encerclées par les forces de l’ordre. On se pose forcément des questions. J’ai de très bons rapports avec mon plus proche voisin. Je suis allé le voir le lendemain. Mais je pense surtout à ce qui peut se dire en ville et à l’école où sont nos enfants», confie B. (*), le secrétaire.

Il fallait bien la présence d’amis élusates, hier matin autour d’une tasse de thé et de gâteaux marocains, pour réconforter ces hommes et ces femmes qui, pour certains, habitent ici depuis 40 ans.

Bernard, «un paysan amorti» comme il se définit avec un beau sens de l’autodérision, fait corps avec ses amis musulmans : «Nous aussi, ça nous a traumatisés. Je l’ai très mal vécu et d’ailleurs, je m’attendais aussi à être perquisitionné».

«Pourquoi, parce qu’on est musulman, serait-on toujours obligé de devoir se justifier ?», s’insurge Aline, une infirmière à la retraite amie d’une famille perquisitionnée.

«On est venus pour travailler et vivre en paix»

«Pourquoi nous ?» : cette question, les Elusates de confession musulmane voudraient bien la poser au préfet. «On a rencontré le maire d’Eauze dimanche pour lui faire part de notre incompréhension mais il nous a dit que ce serait difficile d’avoir un rendez-vous avec le préfet.» Michel Gabas a trouvé ses concitoyens «sincèrement affectés».

En attendant d’hypothétiques réponses, les musulmans d’Eauze ont un message clair et fort à faire passer. «Comme nos parents, on est venus en France pour travailler, vivre en paix et dans la discrétion.»

Est-ce cette trop grande discrétion entourant le lieu de prière de la rue Carbonas qui expliquerait la perquisition de la semaine dernière ? C’est ce qui se murmure à Eauze mais les responsables de l’association se défendent. «Après les attentats de janvier, on était en contacts avec un gendarme. On a toujours ouvert la porte aux RG (1) et à ceux qui voulaient contrôler», précise le secrétaire. L’association concède juste «qu’elle ne peut pas connaître tous les fidèles, notamment ceux de passage. Depuis 2-3 ans, des Marocains qui n’avaient plus de travail en Espagne sont venus ici. De toute façon, à part pour le ramadan où il y a plus de monde, on n’est jamais plus de 30 à la mosquée. C’est d’abord un lieu culturel qu’on a voulu offrir à nos parents pour leur retraite.»

Le dialogue interreligieux

L’association des musulmans d’Eauze est loin d’être repliée sur elle-même. «Depuis plus de 10 ans, on a créé un groupe de paroles. On se retrouve tous les mois ou mois et demi à l’aumonerie du presbytère», indique Aline. «ça a créé des liens de solidarité. On a appris à se connaître entre chrétiens et musulmans. S’il y avait des juifs à Eauze, ils seraient les bienvenus», ajoute Bernard.

La réunion de dimanche sera consacrée aux perquisitions administratives et à leurs conséquences. Les animateurs du groupe de paroles devraient se retrouver au sein d’une nouvelle association «Ensemble pour le Gers», histoire de repousser plus encore le danger du repli communautaire.

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